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Rapace Air Force

Jeudi 19 octobre 2017
Nature

« Tango Charlie à Tour de contrôle, demandons l’autorisation d’atterrir ». C’est le genre de communication que saisissent chaque jour les militaires de la Section de Prévention du Péril Animalier (SPPA) via leur « talkie ». Sur la base aérienne militaire 107 de Villacoublay, sept rapaces veillent jour et nuit sur les 1.9km du tarmac et de ses abords, assurant la sécurité des pilotes et de leurs appareils.

Rapace Air Force

La base militaire cache en son sein une fauconnerie depuis 1988, rattachée à la Tour de contrôle. Elle est gérée par Emmanuel, fauconnier civil lui-même épaulé dans sa mission par quatre militaires techniciens de l’air de la Section de Prévention du Péril Animalier (SPPA). Les fauconniers sont chargés d'effaroucher les oiseaux qui s'installent près de la piste de décollage. Leur rôle est d'installer un climat d'insécurité pour les animaux gêneurs, éloigner durablement les volatiles et ainsi éviter toute collision avec un avion (en particulier un réacteur), qui pourrait provoquer au mieux une détérioration importante de l’appareil et au pire un crash.

Des oiseaux et des hommes

Il existe diverses techniques d’effarouchement : l’acoustique (cris d’alerte via hauts parleur), la pyrotechnique (fusées, etc.), les tirs de régulation (via fusil de chasse). La dernière solution est la fauconnerie, une technique souvent bien plus efficace que les moyens pyrotechniques, auxquels les volatiles ont tendance à s’accoutumer. Le type d’intervention dépendra du temps dont l’équipe dispose et de l’espèce présente en bord de piste, « selon la météo, l’époque de l’année, on peut déterminer quelle espèce est présente », témoigne Emmanuel. L’équipe intervient environ 20 fois par jour (la tour de contrôle leur transmet chaque jour le planning des vols).
On répertorie sur la base de nombreuses espèces type éperviers, faucons crécerelles, corbeaux, pigeons ramiers, corneilles… une avifaune importante ! Les militaires rencontrent même parfois des espèces protégées, et dans ce cas font seulement fuir les volatiles, car ils n’ont pas l’autorisation de les tuer. En effet, la base représente une halte idéale pour tous ces oiseaux, qui y trouvent nourriture (à profusion sur le plateau de Saclay), points d’eau, espaces verts…et surtout ne sont dérangés par aucun prédateur naturel ! Ils peuvent donc se reproduire et proliférer tranquillement. 10 000 pigeons ramiers survolent chaque jour la BA 107 ! « Nous appliquons un procédé préventif », explique le fauconnier. Nous évitons la végétation trop attirante (qui permet de faire son nid), le fauchage est conservé à une certaine hauteur pour gêner la pose des oiseaux, etc. »  

Chasseurs de haut vol

Les fauconniers dressent et socialisent les rapaces. Deux grands types d’oiseaux sont socialisés à la fauconnerie : ceux de ”haut vol”, comme les faucons pèlerins, et ceux dits de ”bas vol”, comme les buses de Harris. Les patrouilles vont changer selon la nature de l'oiseau. Celles effectuées avec la buse se font en voiture car cet animal de bas-vol peut être jeté sur une proie. Lorsqu’ils partent en mission, les faucons sont équipés d’émetteurs, et culminent à une hauteur de 300 à 500m au-dessus du sol. Le faucon va ensuite former une « goutte d'eau », c'est à dire replier ses ailes contre son corps, pour faire son piqué. Espèce la plus rapide du règne animal, il peut atteindre les 400 km/h ! En comparaison, un homme en chute libre avoisine les 250 km/h. Le dressage d’un rapace demande deux ans, ensuite vient l’apprentissage de la « chasse ». Tels des athlètes de haut niveau, les rapaces sont surveillés de très près et chaque jour pesés : « leur poids de chasse est très important », explique Raphaël, assitant fauconnier « s’ils sont trop maigres ils n’auront pas la force de chasser et s’ils sont trop gros ils n’auront pas assez faim pour aller chasser ». Une vie disciplinée donc pour ces prédateurs de compétition. Avec l’œil vif de Soka, Loca, Thor, Villa, Dyonis, Aberlour ou Themba, les pilotes de la BA 107 peuvent manœuvrer en toute sécurité, à tire-d ’ailes…