Philippe Borrel, un œil aiguisé sur la société

« Un monde sans fous », « Un monde sans humains », « Un monde sans travail »… Sa filmographie peut être visionnée comme une série avec des chapitres qui amènent à la réflexion autour de notre société. Les films de Philippe Borrel interpellent et c’est ainsi qu’ils se partagent et se propagent. « La Bataille du Libre », son dixième film, fera escale à Vélizy-Villacoublay le samedi 5 novembre à 15h30 à la médiathèque.

Depuis 2018, le documentaire a déjà voyagé dans 14 pays avec près de 400 projections-débats. « Un film c’est une histoire de rencontres : celle entre le producteur et le sujet, et celle avec les spectateurs en est la continuité. Un format qui dépasse l’exercice du questions/réponses et ouvre systématiquement des discussions animées », indique le réalisateur. S’il ne craint pas s’attaquer à des sujets qui peuvent déranger, Philippe Borrel n’est pas pour autant militant. Son approche journalistique sert de transmission afin que le public puisse s’emparer de l’information et agir en conscience.

Une vocation tirée d’un rêve d’ado

Cette identité engagée que l’on perçoit dans chacune de ses réalisations tient son origine dans un jeu télévisé diffusé sur Antenne 2 de 1976 à 1984. Huit jeunes reporters de nationalités différentes (France, Belgique-Luxembourg, Suisse, Canada) parcourent le monde, caméra au poing et doivent chaque semaine livrer un reportage noté par un jury. Adolescent il ne manque jamais une émission et rêve de postuler à sa majorité. « La Course autour du monde » s’arrête avant ses 18 ans, qu’à cela ne tienne, l’adolescent a trouvé sa vocation. 

Après ses études en sciences politiques, il se spécialise ensuite pour devenir Journaliste Reporter d’Images et sort diplômé du Centre de formation des journalistes en 1990. Le début d’une aventure sans frontière. Le jeune reporter sillonne la planète. Ses projets sont diffusés sur Arte, France 2, France 3, France 5, M6 et Canal Plus. La technologie a évolué au fil des années, sa méthode de travail reste la même.

« Durant ma formation, j’ai appris à retranscrire des sujets non pas avec des mots mais avec des images. Je cherche à décaler le regard du spectateur sur des enjeux qui le concerne », nous explique-t-il. Il construit ses films comme un puzzle. Chaque séquence est une pièce mise en perspective à travers le monde pour dégager une image globale. « Au départ j’ignore tout du sujet. Je pars seul avec mes caméras et mon matériel. La plupart du temps je suis hébergé chez l’habitant », révèle le journaliste. Un travail d’investigation en immersion complète qui peut s’étaler sur deux ans.

Agir pour le commun

De film en film, les thématiques se croisent, les rencontres se multiplient et son réseau se tisse. Sur sa route, il y a des personnalités qu’il retrouve dans différents contextes. C’est le cas de Vandana Shiva, écoféministe indienne, Prix Nobel alternatif 1993, qu’il rencontra pour la première fois sur le tournage de l’émission “Un oeil sur la planète” (France 2).

Dans son dernier documentaire « La Bataille du Libre », la militante y livre un témoignage poignant sur sa lutte contre l’industrie agroalimentaire néolibérale. Ce film qui sera projeté à la médiathèque met en évidence l’impact des évolutions des technologies informatiques et industrielles sur notre société. « Depuis mon premier voyage en Inde en 1986, les promesses de la mondialisation ont creusé des écarts flagrants entre l’extrême richesse et pauvreté. Malgré cela il y a des résistants qui entretiennent des alternatives locales comme des braises au milieu de tas de cendres. » constate le reporter. « La logique du profit qui est à l’oeuvre est néfaste pour nous et notre planète. Jusqu’à preuve du contraire, nous n’en avons qu’une seule », souligne Phillipe Borrel avec une pointe d’ironie en assumant sa subjectivité.

À Vélizy-Villacoublay, terre d’innovation, le partage des connaissances est déjà en action avec les ateliers de la médiathèque (Zéro déchet, Répare café, conférences…) ou encore l’Association pour le Maintien d'une Agriculture Paysanne (AMAP) ainsi que l’Izylab. Nul doute que le débat du 5 novembre sera riche et passionné !