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Romain Forêt, une renaissance artistique grâce au cinéma

Mardi 30 avril 2024
Culture

Des concours de danse à l’Opéra de Paris au Festival du court métrage à l’Onde, le grand écart semble immense et pourtant Romain Forêt n’a pas fini de nous épater. Le parcours du trentenaire vélizien est atypique et prometteur.

Romain Forêt, une renaissance artistique grâce au cinéma

La rencontre se déroule dans l'un des bureaux de l'Hôtel de ville, un lieu qui évoque quelques doux souvenirs à notre invité... À l'âge de 10-11 ans, il sillonnait les couloirs de la mairie dans l'espoir d'approcher le maire. « J’ai fait des pieds et des mains pour obtenir une rencontre avec M. Loisel », se souvient-il. Grâce à sa persévérance, il finit par décrocher le rendez-vous tant attendu. « J'avais des idées et je voulais les exposer de manière directe, en m'adressant aux bonnes personnes », explique-t-il avec un large sourire. Une anecdote qui en dit long sur Romain Forêt : sa détermination et son ambition sont des traits marquants de sa personnalité.

Des premiers pas remarqués

Dès son plus jeune âge, il fréquente assidûment l’École de Musique et de Danse de Vélizy-Villacoublay, débutant par des cours de piano. Inspiré par le film « Billy Elliot » à sa sortie en salles, il nourrit alors le rêve de devenir danseur. À l'âge de 8 ans, il commence à suivre des cours de danse, sous l'oeil attentif de Dorothée Scherpe qui perçoit rapidement son talent. La professeure de danse l’encourage à passer le concours pour intégrer l'Opéra de Paris. « Mes parents ont été convoqués pour en discuter, mais en réalité, ils n'avaient pas le choix. Dans ma tête, c'était une évidence et il était impératif de me laisser suivre ma voie, donc ils m'ont soutenu », À 11 ans, il quitte le cocon familial pour rejoindre l'internat de l'Opéra. « En plus des cours en semaine, je continuais mes cours les weekends », ajoute-t-il en soulignant l’impact pour toute la famille. « Le rythme était effréné, il fallait être à 300% tout le temps. Renoncer à Vélizy n'était tout simplement pas envisageable. L’Onde venait d’ouvrir ses portes et c'était pour moi l'opportunité de briller sur cette nouvelle scène comme soliste, un rôle que l'Opéra ne m’offrait pas… »

La fin d’un rêve

Romain nous confie que pour lui, la danse est bien plus qu'une expression corporelle. Ce « langage du corps » comme il l’appelle, représente également le désir ardent d'être admiré. Cependant, au fil des années, il réalise que ses performances ne sont pas à la hauteur de celles de ses camarades danseurs. « Dans ce milieu, si vous êtes moins fort, vous risquez d'être éclipsé par les autres et les professeurs ne vous prêtent plus attention ». Cette situation lui rappelle douloureusement son séjour à l'orphelinat en Bulgarie, où il voit ses copains partir les uns après les autres. Lui, est adopté à l’âge de 4 ans et demi. Une interminable attente. Ce désir d’être aimé ne le lâchera plus jamais. « À l'Opéra, je savais que je n'étais pas aussi doué que les autres, mais je gardais espoir », poursuit-il. Puis un jour, Gilbert Mayer, figure emblématique de l’Opéra et son épouse Nicole Cavallin lui ont dit : « Romain, tu dois explorer d'autres voies. Tu aimes la danse, mais peut-être que la danse ne t'aime pas assez ». Ce fut un véritable choc pour le jeune danseur de 17 ans, remettant totalement en question son avenir. « Je suis désorienté. On nous préparait à devenir des danseurs étoiles, on nous martelait l'idée que nous étions les meilleurs de France, voire du monde. Je suis profondément malheureux. Je dois me réinventer », conclut-il.

De danseur à acteur

Inspiré par une amie danseuse qui souhaite devenir actrice, il se lance dans une nouvelle aventure en s'inscrivant aux cours Florent. C'est pour lui une manière de relever un nouveau défi comme une sorte de revanche : à son adoption il ne savait pas dire un mot, désormais il veut maîtriser les mots avec prestance. « A l’orphelinat, personne ne nous adressait la parole, la consigne était de ne pas s’attacher. Cette période m'a enseigné l'art de l'observation et la capacité à discerner rapidement les personnes d’influence. » En parallèle de ses études, il a la chance de rencontrer le Maître de chant Molière Athalys. « Il m’a pris sous son aile, m’a introduit dans les hautes sphères, m’a appris les codes pour avoir de la prestance, bien se tenir, s’habiller… en somme, à cultiver toutes les facettes de ce que doit être un artiste ». Il monte un spectacle de poésie avec une comédienne, puis un autre avec un pianiste et la chanteuse lyrique Léïla Brédent.

En tant qu’acteur, il participe à des tournages de court métrages… là encore, cela le ramène à son enfance et l’histoire se répète. Cette fois-ci c’est l’ancien directeur de Warner qui lui dit que ce métier n’est pas fait pour lui. Il le voit directeur. De quoi ? il ne le sait pas encore, mais en attendant François Rouffeteau lui dit de l’accompagner et de faire des captations de spectacle. Romain accepte et le suit un peu partout et même en Bulgarie… « Je leur ai fait un peu faux bond pendant les répétitions, j’étais comme un fou, je n’avais qu’une idée en tête : retrouver mes racines ». Romain nous raconte en détail sa visite à l'orphelinat, depuis l'accueil chaleureux du personnel, la visite guidée des lieux jusqu'au moment glacial où il a été contraint de partir après avoir mentionné le nom de sa mère biologique dans l’espoir d’obtenir des informations sur elle. Pourquoi tant de mystère ? Face à cette réaction brutale et aux nombreuses questions en suspens, il décide de coucher ses pensées sur papier, avec l'idée de les adapter en un scénario de film. Conscient de la nécessité de se professionnaliser pour embrasser le septième art, il veut passer à la vitesse supérieure.

La révélation tant attendue

Déterminé, Romain réussit à s’infiltrer sur le tournage du film « La Fine fleur » de Pierre Pinaud. « Au départ, c’était pour une mission d’une journée, puis deux et j’ai tellement été insistant qu’ils m’ont gardé un an ! C'est là que j'ai découvert ma véritable vocation ». Pendant le confinement, il s'attèle à l'écriture et à la réalisation de son premier court métrage, « Faux-semblant », tirant son inspiration de son propre vécu. Le film présente un acteur en audition pour le rôle d'un jeune en quête de ses origines dans un orphelinat. "J'avais un budget restreint, mais je voulais faire les choses sérieusement. J'ai organisé de vrais castings pour choisir les acteurs, je les recevais comme Pierre Pinaud. Je voulais suivre ses pas." Le film fait l’ouverture du Festival européen du film court de Brest, puis il est sélectionné au festival de Court Métrage de Vélizy-Villacoublay. Les critiques sont élogieuses. Il s’empresse d’écrire un nouveau scénario « Juste au corps » où un jeune danseur tente en vain le concours pour devenir danseur étoile. Fabienne Wipf, la directrice du Festival de Brest avec qui il s’est lié d’amitié, relit le scénario et l’aide à l’affiner. Puis le jeune réalisateur se lance un nouveau défi : tourner à l’Opéra de Paris. Pour atteindre son but, il doit convaincre et présenter un projet bien ficelé. Il recrute une équipe de 110 personnes composée de 40 techniciens, 40 figurants, 10 acteurs, 10 personnes en post production. Il réussit à négocier la gratuité des lieux, du jamais vu ! Son audace paie.

Ce projet lui permet de renouer avec son passé. Ceux qui doutaient de ses capacités en danse il y a plus de 10 ans ont soutenu cette nouvelle initiative et ont été d'un véritable appui dans sa concrétisation. Sorti en novembre 2023, ce nouveau court métrage a déjà été présenté dans deux festivals, à Brest et à Cleveland aux Etats-Unis. Il a également été sélectionné pour la 36e édition du festival du court métrage à L’Onde ! Alors que son film commence à faire son chemin, Romain Forêt se tourne déjà vers l'avenir. Il envisage de relever un nouveau challenge : réaliser son premier long métrage. Nous avons eu le privilège d'être dans la confidence et de découvrir le synopsis : une histoire captivante qui promet ! « Je suis actuellement en quête de financement, je constitue mon équipe, et j'adore ça. C'est tellement excitant. Je sens vraiment que je suis à ma place. » Espérons que nous aurons l'avant-première dans la nouvelle salle de cinéma du Centre Maurice Ravel.